Bulletin 220 #2 - Loi sur l'aménagement du territoire : une révolution sur papier ?
Édito - Après des décennies d'attente, la République démocratique du Congo détient enfin sa première loi sur l'aménagement du territoire. Adopté par les deux chambres du Parlement au cours de la session de mars 2025, ce texte historique, porteur d'immenses espoirs, dit vouloir assurer une mise en œuvre cohérente, sur l'ensemble du territoire national, de la politique nationale du développement ainsi que des politiques publiques et des lois sectorielles à tous les échelons territoriaux, dans une démarche ouverte, participative, coordonnée et intégrée. Il veut fixer les principes relatifs à l'occupation de l'espace physique, à la répartition équilibrée des populations, des activités, des infrastructures, des équipements, des installations et des services sur le territoire national ainsi qu'à l'affectation des zones aux différentes destinations sectorielles; enfin, il veut déterminer les modalités de centralisation des données relatives aux inventaires multi-ressources, aux études économiques, sociales et environnementales ainsi que de réalisation des arbitrages intersectoriels en vue des décisions concertées dans la répartition et l'affectation des zones.
La volonté politique semble au rendez-vous. Portée par le gouvernement et saluée par la société civile, la loi est présentée comme un « outil de souveraineté » et un levier de développement essentiel. Elle promet de remplacer des décennies « d'improvisation » par une planification rigoureuse, en créant des outils de gouvernance modernes comme un observatoire national et des plans d'aménagement à tous les échelons.
Pourtant, une fois l'euphorie de l'adoption passée, la question la plus critique demeure : cette loi parviendra-t-elle à transformer la réalité sur le terrain? Le défi est colossal. Sans mesures d'application rapides et sans un renforcement massif des capacités des provinces et des entités territoriales décentralisées, ce texte, aussi ambitieux soit-il, risque de rester lettre morte.
Les villes continuent de s'étendre de manière exponentielle et chaotique, les conflits fonciers persistent et la pression démographique sur les infrastructures et les ressources naturelles s'intensifie. Le passage de la vision à l'action est désormais l'épreuve de vérité. Ce deuxième numéro du bulletin 220 retrace le processus ayant conduit à la promulgation de ce texte.
Damien Kapay
Assistant de recherche au pilier politique