Quels sont les enjeux de la mission de l’informateur en RDC ?
Augustin Kabuya, secrétaire général de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) a rappelé le 15 février, sa mission en tant qu’informateur nommé par le président de la République Félix Tshisekedi. Pourquoi cette étape est nécessaire avant la formation du gouvernement et quels en sont les enjeux ?
Bonjour et bienvenue dans ce 6e épisode de la saison 4 de Po Na GEC, capsule audio du Groupe d’étude sur le Congo (GEC) et d’Ebuteli, institut congolais de recherche sur la politique, la gouvernance et la violence, qui tente chaque semaine d’éclairer un sujet d’actualité en RDC. Je suis Ange Makadi Ngoy, chercheuse à Ebuteli. Nous sommes le vendredi 16 février 2024.
À l’issue des élections législatives du 20 décembre dernier, 43 partis et regroupements politiques ont obtenu au moins un siège à l’Assemblée nationale. Parmi ces formations, seules cinq sont officiellement de l’opposition avec moins de 40 députés nationaux sur 477 proclamés provisoirement élus par la Commission électorale nationale indépendante (Ceni). Les 38 autres ont concouru tout en étant membres de l’Union sacrée de la nation, une plateforme électorale autour du président Félix Tshisekedi.
Les résultats provisoires des élections législatives indiquent donc clairement qu’aucune de ces formations politiques n’a atteint à elle seule la majorité absolue au sein de l’Assemblée nationale, soit 251 députés nationaux. Bien que l’Assemblée nationale ne dispose actuellement que de 477 élus.
Dans ce contexte, l’article 78 de la Constitution exige au président de la République de nommer un informateur pour l’aider à identifier officiellement une majorité au sein de l’Assemblée nationale. La nomination d’Augustin Kabuya comme informateur répond à cette exigence. Elle marque une rupture avec la pratique de 2019 par laquelle Félix Tshisekedi avait mis en place son premier gouvernement sur base d’un simple accord de coalition entre sa formation politique, le Cap pour le changement et celle de son prédécesseur, le Front commun pour le Congo (FCC). Après la rupture de la coalition FCC-Cach et avant la mise en place du gouvernement Sama Lukonde en 2021, le président Félix Tshisekedi avait cette fois-ci nommé Modeste Bahati, actuel président du Sénat, informateur.
En pratique, la mission de l’informateur est devenue délicate depuis cette requalification de la majorité parlementaire fin 2020 à l’Assemblée nationale. Désormais, selon l'arrêt de la Cour constitutionnelle du 15 janvier 2021 pris dans le but d’aider le président Félix Tshisekedi à se défaire de ses alliés du FCC, un député jouit de la liberté totale de décider de son appartenance ou non à la majorité parlementaire indépendamment de l’affiliation réelle de sa formation politique. Cela suppose qu’un parti peut indiquer à l’informateur son affiliation à la majorité et par la suite certains de ses élus peuvent se déclarer appartenir à l’opposition. Car, au début de chaque législature et ce, sauf changement du règlement intérieur, les élus sont appelés à se prononcer sur leur appartenance à la majorité ou l’opposition parlementaire.
La présente mission de l’informateur devrait donc rappeler aux acteurs politiques que la stabilité gouvernementale est un enjeu important depuis l’arrêt de 2021.
D’autant que la Cour constitutionnelle n’est pas encore revenue sur sa décision par un arrêt de revirement. Un tel revirement permettrait pourtant de garantir uniquement la liberté des élus pour leurs opinions et votes, et non plus leur liberté de changer d’appartenance politique, scellée par les électeurs lors des élections.
L'informateur devrait aider le président de la République à identifier les rapports de force au sein de la nouvelle majorité et déterminer les quotas de répartition des postes de responsabilité au sein du gouvernement et éventuellement des autres institutions. Augustin Kabuya voudrait tenter de mettre en place des garde-fous pour éviter un basculement de la majorité au cours de cette législature, par la signature des actes d’engagement. Ces actes d’engagement ne sont pas suffisants dans la mesure où ils ne sont au-dessus de l'arrêt de la Cour. La probabilité d'avoir une majorité fragile et instable est trop élevée surtout en cas d'insatisfaction des partages des responsabilités au sein du prochain gouvernement.
En raison de la fragmentation de cette majorité, il est à craindre que le gouvernement à venir soit éléphantesque. La création des grands ensembles solides est importante pour permettre de dégager plus facilement une majorité puisque des partis ou regroupements politiques dits « mallettes », ne sont pas faciles à coordonner après les scrutins.
En attendant que l’informateur finalise ses consultations et dépose son rapport au président de la République, vous pouvez recevoir Po Na GEC, chaque vendredi sur votre téléphone en envoyant « Ebuteli » ou « GEC » par WhatsApp au +243 894 110 542. À très vite !
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