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Regain d'insécurité : que se passe-t-il à Goma ?

Regain d'insécurité : que se passe-t-il à Goma ?

19 avr. 2024

Chaque jour à Goma, des graves incidents impliquant des personnes armées sont signalés. Parfois, un corps sans vie est retrouvé dans des quartiers autour de la ville ; d’autres fois, des braquages armés surviennent en ville et en pleine journée ; parfois encore, des altercations plutôt bénignes dégénèrent en meurtres, comme ce fut le cas il y a quelques jours lorsqu’un homme armé a tiré à bout portant sur un chauffeur du Comité international de la Croix-Rouge. Ces violences sur les civils ne sont plus isolées. Les Wazalendo ou VDP – volontaires pour la défense de la patrie –, ces miliciens qui se battent aux côtés de l’armée contre le M23 soutenu par le Rwanda sont souvent cités comme responsables de l'insécurité. Mais sont-ils les seuls à blâmer ? 

Bonjour !

Je suis Fred Bauma, directeur exécutif de Ebuteli. Vous écoutez le 15e épisode de Po Na Biso, capsule audio d'Ebuteli et du Groupe d'étude sur le Congo (GEC) qui donne notre point de vue sur une question d’actualité en RDC. Nous sommes le vendredi 19 avril 2024.

Les VDP sont-ils finalement responsables de l’insécurité dans et autour de la ville de Goma ? C’est ce qu’on penserait en écoutant plusieurs acteurs politiques à Goma et une partie de la société civile. Et il y a des raisons de le croire. Mais d’autres facteurs pourraient aussi justifier le regain d’insécurité dans la ville de Goma. 

Pour commencer, il convient de rappeler que les assassinats ciblées ne sont pas une réalité nouvelle à Goma, bien qu'au cours des dernières semaines, la situation se soit fortement dégradée et les groupes criminels semblent opérer plus librement. Les Wazalendo paraissent être la cible facile pour porter le blâme. D’une part, cette appellation englobe aussi bien des groupes structurés avec une chaîne de commandement relativement claire comme l’Alliance des patriotes pour un Congo libre et souverain (APCLS) de Janvier Karairi, ou la coalition des Mouvements pour le changement (CMC) de Jules Mulumba. Mais Wazalendo décrit aussi d'autres individus qui, au fort de l’agression rwandaise, ont décidé de prendre les armes. Cette prolifération des groupes d'autodéfense a accentué la circulation incontrôlée d’armes, y compris entre les mains des civils. Récemment, sous pression, certains groupes armées ont instruits leurs combattants de ne pas circuler avec les armes dans la ville. Le gouverneur militaire, dans une rencontre, a réitéré le même message aux VDP, mais également aux FARDC. 

Car les Wazalendo ne sont pas les seuls responsables de l’insécurité dans la ville de Goma. Depuis le début de la guerre et surtout depuis que le M23 a quasiment assiégé la ville, Goma est sur-militarisé. En plus des casques bleues de la Monusco, des militaires burundais et de la mission de l’Afrique australe, SAMI RDC, ou encore des instructeurs militaires, la ville connaît une forte concentration des FARDC, incluant certains militaires indisciplinés, des déserteurs et d’autres qui sont longtemps restés dans des zones d'opérations. Plusieurs incidents récents ayant conduit à la mort des civils impliquent des FARDC issues des diverses unités. Plusieurs parmi eux ont été arrêtés et un au moins a été condamné à mort. Mais ces arrestations et les patrouilles de la police militaire n’ont jusque-là pas été en mesure d’endiguer la criminalité dans la ville. Selon certains responsables politiques, la relève au sein des unités présentes à Goma pourrait permettre de réduire la violence. 

Mais au-delà des Wazalendo et des FARDC, la grave crise humanitaire autour de la ville de Goma n’offre pas de meilleures conditions pour la sécurité. Cette ville d’un peu plus d’un million d’habitants a, en quelques mois, accueilli plus de 500 000 personnes dans des camps de depacés. Dans ces endroits de misère circulent librement des hommes armés parfois en tenues civiles. La violence de ces derniers a parfois poussé les déplacés au bout de leur patience, allant jusqu’à des scènes de justice populaire. 

Enfin, la violence permanente dans la ville de Goma renforce l’idée d’une guerre d’usure qui pourrait pousser les populations civiles à se révolter contre ceux qui ont le mandat de les protéger. Dans ses déclarations récentes, l’Alliance Fleuve Congo de Corneille Nangaa n’a pas hésité de surfer sur cette situation pour renforcer son discours de pseudo-libérateur. 

Dans une manifestation organisée cette semaine à Goma, les mouvements citoyens et organisations de la société civile ont demandé des mesures concrètes, notamment le remplacement de l’actuel maire de la ville. Ils ont été arrêtés et ont passé deux nuits en détention avant d’être libérés. Si le gouvernement continue d'ignorer ces voix, il risque de perdre le soutien populaire dont il a grandement besoin.

Vous pouvez rejoindre notre fil WhatsApp en envoyant « GEC » ou « Ebuteli » au +243 894 110 542 pour recevoir Po Na Biso chaque vendredi sur votre téléphone. À bientôt !

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