La Cour constitutionnelle, toujours sous pression politique ?
La Cour constitutionnelle est la plus haute juridiction en RDC. Elle est notamment chargée de trancher les contentieux électoraux et de garantir l’intégrité du processus électoral. Ces dernières années, elle suscite de plus en plus de doutes quant à sa composition et son fonctionnement. Nominations controversées, décisions jugées partisanes, dépendance budgétaire.
Bonjour,
Je suis Prisca Helali, fellow à Ebuteli. Aujourd’hui, je vous propose un retour sur les grandes lignes de notre note thématique intitulé : La Cour constitutionnelle face aux pressions politiques, publiée en juin 2024 et disponible sur www.ebuteli.org.
Depuis sa création en 2015, la Cour constitutionnelle joue un rôle central dans le système électoral congolais. Elle statue sur les contentieux électoraux et valide les résultats provisoires. Mais dans la pratique, les signes de politisation sont nombreux.
Malgré les garde-fous prévus par la Constitution – notamment la répartition des désignations de juges entre le président de la République, le Parlement et le Conseil supérieur de la magistrature, ainsi que l’inamovibilité des juges – les pressions politiques ont contourné ces dispositifs.
En 2022, par exemple, le renouvellement d’un tiers des juges a donné lieu à l’éviction controversée de Dieudonné Kaluba, alors président de la Cour, à l’issue d’un tirage au sort opaque. Ce mécanisme, censé garantir l’impartialité, a au contraire renforcé les soupçons d’ingérence. Trois ans plus tard, en juillet 2025, Dieudonné Kamuleta est réélu président de la Cour à l’issue d’une plénière élective, pour un mandat de 3 ans alors qu’il lui reste 2 ans à la Cour, pour totaliser 9 ans, comme l’exige la Constitution.
En 2023, la Cour a rejeté une requête collective dénonçant de graves irrégularités dans la gestion de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni). Lors de la publication des résultats de la présidentielle, la Cour a corrigé les chiffres provisoires suivant l'annulation des scrutins à Yakoma et Masimanimba, sans pour autant chercher l’incidence des irrégularités signalées pour les 82 candidats dont les suffrages avaient été annulés sur l’ensemble du territoire national par la Ceni.
Et puis, il y a l’affaire Bukanga Lonzo, impliquant l’ancien Premier ministre Augustin Matata Ponyo. D’abord suspendue en pleine période électorale – une décision interprétée tantôt comme une mesure de décrispation, tantôt comme une stratégie politique – les poursuites ont repris, et Matata Ponyo a été condamné en mai 2025 à dix ans de travaux forcés pour détournement de fonds publics.
Au-delà des pressions politiques, la Cour fait face à des fragilités budgétaires préoccupantes. Le budget de la justice reste insuffisant, ce qui rend les juges plus vulnérables, freine les réformes, et ralentit le traitement des contentieux électoraux.
Alors, que faire ? Lors de notre forum public en juin dernier, une recommandation a émergé : clarifier le rôle de la Cour, pour qu’elle n’intervienne que lorsqu’une partie conteste officiellement les résultats, et ne plus en faire une troisième instance automatique du processus électoral. Cela permettrait de réduire les pressions politiques sur ses membres et de restaurer sa crédibilité.
Notre note recommande également la transparence dans la procédure de désignation, avec des critères clairs et publics, et un financement sécurisé et suffisant, pour garantir son autonomie et son impartialité.
Merci d’avoir suivi ce briefing !
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