Séminaire gouvernemental : les ministres de Suminwa peuvent-ils mieux faire ?
« Soyez pragmatiques et obtenez-moi des résultats. C’est le mandat que le peuple nous a donné ». C’est l’une des directives que le président Félix Tshisekedi a formulées aux membres du gouvernement à l’issue du séminaire gouvernemental tenu du 21 au 23 juillet 2024 à Kinshasa. Cette réunion et bien d’autres par le passé n’ont pas produit les effets escomptés. Pourquoi ces réunions ne suffisent pas pour booster la mise en œuvre des engagements gouvernementaux ?
Bonjour ! Je m’appelle Ithiel Batumike. Je suis chercheur au pilier politique d'Ebuteli. Vous écoutez le 29e épisode de la saison 4 de Po Na Biso, capsule audio d’Ebuteli et du Groupe d’étude sur le Congo (GEC). Nous sommes le vendredi 26 juillet 2024.
Depuis l’époque de l’ancien président Joseph Kabila jusqu’à ce jour, l’organisation d’un séminaire gouvernemental est devenue une pratique constante en RDC à chaque sortie d’un nouveau gouvernement. Ces sessions visent à partager avec les ministres les principes directeurs, les valeurs cardinales, et les obligations régissant leurs fonctions, ainsi que les objectifs du programme approuvé par l’Assemblée nationale.
Malgré ce séminaire et d’autres réunions de l’exécutif, les gouvernements successifs n’ont pas été souvent capables de réaliser les différents engagements auxquels ils avaient souscrits devant la représentation nationale. Talatala, baromètre de l’activité parlementaire et de l’action du gouvernement, a pu constater par exemple, que le précédent gouvernement dirigé par Sama Lukonde n’avait tenu que 12 engagements sur les 68 répertoriés concernant la réforme de la justice, la lutte contre la corruption, la gouvernance électorale et le secteur de sécurité.
Pourtant, depuis l’arrivée au pouvoir de Félix Tshisekedi, le gouvernement a multiplié les conseils des ministres. Contrairement à son prédécesseur qui organisait rarement ces principales réunions d’évaluation, de délibération et de prise de décision de l’exécutif congolais sur la conduite des affaires publiques, Félix Tshisekedi en a organisé, chaque vendredi, plus d’une centaine au cours de son premier mandat.
Cependant, certaines de nombreuses décisions arrêtées dans ces réunions n’ont souvent pas été mises en œuvre. Au cours d’un conseil des ministres tenu en octobre 2021 par exemple, le président Tshisekedi avait exhorté les membres du gouvernement, ceux de son cabinet et les hauts-cadres de la République à être les premiers à respecter le code de la route et à montrer l’exemple. Pourtant, trois ans après, ce sont ces derniers qui continuent de rouler à contresens en violation dudit code.
Cet exemple illustre qu’un dispositif de suivi-évaluation de ces décisions et des animateurs censés les appliquer et un mécanisme de sanction font défaut dans la plupart des cas. Le programme d’actions du gouvernement Sama n’avait d’ailleurs pas prévu un quelconque dispositif pour son suivi évaluation. Le conseil présidentiel de veille stratégique (CPVS), structure chargée principalement de suivre et d’évaluer la mise en œuvre des engagements du président de la République repris dans le programme commun du gouvernement, semble n’avoir pas atteint le résultat escompté dans ce domaine. Aucun ministre n’a été sanctionné pour défaut de résultats.
De même, la promesse de l’évaluation trimestrielle des gouverneurs ne semble même pas avoir été implémentée. La conférence des gouverneurs qui devrait servir à une certaine évaluation de la politique nationale au niveau des provinces semble se limiter à la caporalisation des autorités locales. L’actuel gouvernement promet de la revitaliser, signe que, jusqu’ici, cette conférence ne joue pas correctement sa mission.
Malgré ce tableau peu reluisant, l’espoir pour le suivi-évaluation des actions de l’exécutif et de ses animateurs reste permis. Au cours de ce séminaire gouvernemental, Félix Tshisekedi a rappelé que des « évaluations périodiques seront effectuées pour mesurer la performance de chaque membre du gouvernement par rapport aux résultats attendus ».
Pour cela, il peut espérer compter cette fois sur la clairvoyance du gouvernement actuel qui prévoit dans son programme d’actions «un système de suivi et évaluation trimestriel pour ses revues en vue de s’assurer de son état d’avancement et de prendre, le cas échéant, les mesures correctives ».
Ce dispositif ne peut cependant être efficace que si les différents engagements souscrits par le gouvernement sont précisés en termes de délais de leur mise en œuvre et d’autres indicateurs de performance. Le parlement devrait aussi jouer pleinement son rôle de contrôle de l’action de l’exécutif.
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